I- LES CONSEQUENCES AU NIVEAU MONDIAL
A- LES CONSEQUENCES FINANCIERES
Le FMI a qualifié la crise actuelle de « choc financier le plus dangereux depuis les années 30 ».
Cette crise financière touche d’abord les banques, qui fournissent à l’économie son oxygène, le CREDIT.
Les banques ne se font plus confiance et n’arrivent donc plus à se financer entre elles, ce qui assèche le crédit aux Etats-Unis et dans le monde entier.
► RATIONNEMENT DU CREDIT (« credit crunch ») :
En effet, les banques se sont endettées massivement, en distribuant des crédits et actuellement elles doivent donc se recapitaliser et en même temps réduire les crédits distribués. Donc il y a moins de crédits distribués aux ménages et aux entreprises, et les banquiers sont plus réticents à prêter, surtout sans apport personnel pour des crédits immobiliers. Actuellement les jeunes ménages désirant un prêt immobilier sont les plus touchés et les taux d’intérêt ont eu plutôt tendance à remonter, malgré les baisses récentes des taux de la BCE (taux BCE au 5/12/08 = 2,5 %).
Les PME ont des problèmes de financement de leur trésorerie, d’autant plus qu’elles sont déjà endettées (baisse de l’autofinancement cette année).
► CRISE DE LIQUIDITES ET RESTRUCTURATION BANCAIRE :
▪ Pour les pays industrialisés
Dès la faillite retentissante de la banque d’investissement Lehman Brothers aux E-Unis, on assiste à toutes les interventions publiques possibles pour éviter l’effondrement du système bancaire mondial et de l’ensemble de l’économie.
Il faudra un mois pour stabiliser la situation malgré les milliers de milliards de $ déboursés sans que l’on soit sûr que le système soit complètement assaini.
En fait la décision de laisser couler Lehman a été le déclencheur des difficultés de toutes les autres banques dans le monde (effet domino).
Les banques sont alors dans un double piège :
- une incapacité à se financer à court et moyen terme (crise de liquidités) ;
- une incapacité à trouver des investisseurs qui n’ont plus confiance (crise de capital).
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En même temps, la dépréciation de leurs actifs entraîne des pertes en capital sans compter la chute de leurs cours de bourse, bref leur existence est menacée.
Deux jours après Lehman, des banques britanniques font faillite et sont nationalisées par l’Etat ou rachetées par des concurrentes.
Devant cette situation, le secrétaire américain au Trésor, Henry Paulson lance un PLAN (Plan Paulson) d’urgence (18 septembre 2008) : l’Etat américain propose 700 milliards de $ pour racheter les créances « pourries » détenues par les banques. Le plan prévoit aussi que l’Etat puisse entrer au capital des banques ; que la procédure d’aide des banques soit encadrée démocratiquement et que les rémunérations des dirigeants soient réduites (pas de parachutes dorés). Ce plan, après de longues discussions et des refus de vote, sera finalement accepté et voté début octobre.
En même temps le gouverneur de la réserve fédérale américaine commence à baisser les taux d’intérêt (ils sont passés de 5,25 % à 1 % actuellement).
Les autres banques centrales des pays développés réagissent aussi en injectant des milliards de $ et d’€ dans les banques pour qu’elles se refinancent ; en octobre elles se concertent pour baisser ensemble leur taux directeur.
En octobre, Paulson a débloqué 250 milliards de $ pour recapitaliser les banques américaines, d’autres pays comme la Suisse, l’Inde, l’Australie… établissent des plans d’intervention dans leurs banques : total = 3 000 milliards de $ pour sauver le système bancaire mondial.
Actuellement, les banques d’affaires de Wall Street ont disparu, mais d’autres banques américaines ont fusionné et sont devenues des poids lourds de la finance (Bank of America et JP Morgan).
Mais ce sauvetage des banques a un coût : l’économie américaine est surendettée et il y aura des ajustements à faire.
En ce qui concerne la situation européenne, la 1ère place financière mondiale est Londres et il est donc vital pour les Britanniques que le système financier mondial retrouve son dynamisme, ce qui explique la rapidité du sauvetage des banques par le gouvernement britannique.
Les banques anglaises ont donc été sauvées de justesse de la faillite et ont été nationalisées, ce qui aurait été impensable à l’époque de Mme Thatcher !!!
La crise entraîne une restructuration du paysage bancaire européen avec des regroupements : la BNP a repris FORTIS (belge et néerlandaise) et devient ainsi le n° 1 européen, mais sans prétendre pour autant dominer la finance mondiale qui va certainement rester influencée par les Etats-Unis.
On pourrait croire, comme le ministre allemand des finances, que les E-Unis vont « perdre leur statut de superpuissance financière » ; en fait, les décisions prises aux E-Unis vont certainement continuer à influencer celles qui seront prises dans le reste du monde (voir la réunion du G20 du 15/11). Et le dollar reste la monnaie dominante de la finance mondiale, avec un taux de change qui résiste à la crise.
▪ Pour les pays émergents : ils sont aussi touchés par la crise financière : les Bourses asiatiques ont connu de gros plongeons et la bulle spéculative de l’immobilier chinois est en train d’exploser (prix et ventes en chute libre) ; le dégonflement de la bulle immobilière se cumule au coup de frein sur les exportations et les investissements qui leur sont liés.
Les pays de l’Europe centrale et orientale sont très vulnérables, car ils dépendent de capitaux extérieurs pour leur économie : ils risquent le retrait des investisseurs : la Hongrie par exemple et l’Ukraine. Avec l’Islande, ces pays ont conclu des accords de prêts auprès du FMI, ainsi que le Pakistan et la Biélorussie. La Roumanie et la Bulgarie, les derniers rentrés dans l’UE, sont aussi en difficulté (déficits très importants, dette extérieure forte).
► LE SCANDALE « MADOFF »
C’est une fraude « pyramidale » : les investisseurs d’hier sont rémunérés avec les dépôts de leurs successeurs et non avec les produits de leurs placements, ce qui offrait aux épargnants des intérêts très supérieurs à ceux du marché.
Le responsable de cette arnaque estimée à 37 milliards d’€ (50 milliards de $) est l’ex-président du Nasdaq, ex-membre de la SEC gendarme de la Bourse américaine !! Les premiers escroqués sont le gratin de la finance et les très grosses fortunes.
Déjà mise en cause pour ne pas avoir anticipé la crise des « subprime », la SEC est au premier rang des accusés (enquête en cours) ; en attendant, plusieurs banques européennes sont parmi les victimes de cette escroquerie (BNP, Natixis, Santander).
► ENDETTEMENT DES ETATS
Où trouver tout cet argent nécessaire au sauvetage bancaire et au soutien de l’économie ?
Réponse : en empruntant sur les marchés financiers, en émettant des bons du Trésor aux E-Unis, ou des Obligations assimilables du Trésor (OAT) en France que peuvent acheter les investisseurs du monde entier. En zone euro, 30 % de titres seront lancés en plus en 2009 par rapport à 2008. Pour le moment, les investisseurs se ruent sur les dettes souveraines ou garanties par les états car il y a moins de risque de pertes.
Ces titres souverains sont si demandés que leur rendement (taux d’intérêt à payer) s’effondre : les états empruntent pour pas cher (2,5 % à cinq ans en France). Mais le risque est que les états soient obligés de s’endetter encore pour d’autres plans de sauvetage et de relance si l’économie ne redémarre pas ; et la charge de la dette s’alourdirait encore pour les générations futures.
B- LES CONSEQUENCES ECONOMIQUES
En fait, la panique financière a fortement accéléré un ralentissement économique qui existait déjà avec le prix du pétrole et des matières premières en forte hausse.
► BAISSE DE LA CROISSANCE ECONOMIQUE MONDIALE : RECESSION
La plupart des économies européennes sont entrées en RECESSION (baisse du PIB) en cette fin d’année ; et les perspectives pour 2009 ne sont guère optimistes : il y aurait une reprise à la fin de l’année prochaine au plus tôt, les plus pessimistes ne voient pas de retour à la croissance avant la fin de l’année 2010. Dernière prévision au 17/12/2008 : la récession durerait 18 mois : le FMI prévoit la plus importante récession de l’après-guerre dans les pays développés.
Chiffres des prévisions : croissance zone euro 2009 = - 0,5 % ; E-Unis = - 0,9 %
Exemple : ventes de voitures neuves en Europe : - 25,8 % en novembre 2008.
La crainte la plus forte : c’est la DEFLATION : « mouvement de baisse des prix généralisé, durable et qui se transmet aux anticipations des agents » (INSEE) ce qui serait dévastateur de l’avis général des économistes : prévoyant une baisse des prix, les consommateurs diffèrent leurs achats, aggravant le repli de l’activité ; l’effet est accentué par l’impact sur l’endettement des agents (situation du Japon années 90).
En France actuellement, le risque de déflation est encore jugé minime par la plupart des économistes ; en effet, il reste un « noyau dur » d’inflation en excluant les produits à prix volatils (énergie, alimentaire frais, tarifs publics) qui est à un niveau élevé : hausse de 0,1 % en novembre, 1,9 % sur un an.
La déflation est redoutée, surtout aux E-Unis où la désinflation est très rapide.
Face à cette menace, la Réserve fédérale américaine a décidé d’abaisser ses taux directeurs entre 0 et0,25 %, c’est le plus bas niveau historique. Cette décision vise à rassurer les marchés au moment où le recul de l’inflation s’accélère.
Pour éviter la déflation en Europe, il faut que la BCE baisse rapidement ses taux d’intérêt, (2,5 % dans la zone euro).
► MONDIALISATION DE LA CRISE
Les pays du Sud n’échapperont pas à la crise qui se propage par plusieurs canaux : les exportations : baisse de la croissance du commerce mondial ; la chute du prix des produits de base fragilise les exportateurs de matières premières. Toute l’Afrique et la majorité des pays d’Amérique latine ont leurs revenus extérieurs qui diminuent fortement.
La Russie, les pays de l’Europe de l’Est sont fortement touchés par la crise, on l’a vu au niveau financier ; la production a baissé de 9 % en Russie au mois de novembre et la baisse des cours du pétrole accentue les difficultés économiques.
Au niveau financier, il y a une plus grande méfiance des investisseurs envers les pays du Sud.
Le Japon est aussi touché avec une restructuration et des suppressions d’emploi dans l’automobile et dans le secteur hi-fi avec Sony .
II- LES CONSEQUENCES DE LA CRISE AU NIVEAU NATIONAL
A- LES CONSEQUENCES FINANCIERES
Pour les agents économiques : il s’agit principalement d’une baisse des crédits distribués aux ménages et aux entreprises. Les banques sont plus frileuses pour accorder leurs crédits et ont augmenté le taux d’intérêt pour les clients peu sûrs. Ce problème peut accentuer les difficultés des PME et TPE.
Une autre conséquence est la chute des cours de la Bourse qui entraîne une perte d’actifs pour les entreprises.
La récession va provoquer de nombreuses faillites d’entreprises qui vont fabriquer de nouvelles pertes bancaires. On peut donc craindre que la récession se nourrisse d’elle-même : l’insolvabilité des entreprises peut déclencher une nouvelle panique bancaire.
Pour l’Etat : augmentation de la dette publique, puisqu’il faut emprunter pour financer les mesures de relance économique et les aides aux entreprises en difficulté. Le remboursement de la dette est le 2e poste du budget de l’état après l’éducation.
B- LES CONSEQUENCES ECONOMIQUES ET SOCIALES
→ AU NIVEAU MICRO-ECONOMIQUE (pour les agents économiques)
Pour les PME, l’assèchement du crédit leur fait courir un risque réel de faillite. Les entreprises de tous les secteurs sont concernées, malgré le plan français de soutien aux banques qui ne produit pas encore tous ses effets ; plus des trois quarts des banques avaient déjà durci leurs critères d’attribution de crédit aux entreprises au 3e trimestre.
Les entreprises renoncent donc à leurs projets d’investissement et d’embauches.
Les grandes entreprises sont pénalisées par leur fort niveau d’endettement (chute du taux d’autofinancement à 51 %) dû à l’effet de levier (rentabilité supérieure au taux d’intérêt), ce qui leur a permis ces dernières années de doubler les dividendes versés aux actionnaires.
Avec la récession actuelle, la chute des profits menace l’investissement, car les entreprises vont préférer satisfaire leurs actionnaires et différer leur décision d’investir.
Cette situation défavorable des entreprises a des répercussions sur l’ensemble de l’économie.
→ AU NIVEAU MACRO-ECONOMIQUE
► HAUSSE DU CHOMAGE :
Prévisions : en zone euro : 8,6 % en 2009 (7,4 en 08) ; E-Unis : 7,3 % (5,7 en O8). Chiffre actuel en Fr ance : 7,3 %.
La baisse de l’activité dans certains secteurs comme l’automobile et le bâtiment entraîne du chômage partiel, des fermetures d’entreprises et des délocalisations. Les usines Peugeot ne produiront pas pendant un mois (du jamais vu depuis 1912), d’autres tournent au ralenti ; ceci se répercute sur tous les sous-traitants très nombreux dans ces 2 secteurs d’activité (Michelin…).
La dégradation des perspectives d’activité provoque aussi une baisse des embauches et les plus touchés restent les jeunes.
Cette hausse du chômage entraîne une baisse des revenus des ménages.
► BAISSE DE LA CONSOMMATION ET DE L’INVESTISSEMENT
La hausse des prix du pétrole, des matières 1ères et des produits alimentaires au 1er semestre 2008 avait déjà entraîné une baisse des revenus et du pouvoir d’achat des ménages ; ce qui provoque systématiquement une baisse de la consommation.
Celle-ci représente en effet 65 à 70 % du PIB, la baisse de la consommation va donc entraîner une stagnation ou une baisse du PIB.
Des ménages travaillant dans le secteur privé sont touchés par une baisse des revenus (chômage ou chômage partiel) ; d’autres craignent pour leur emploi.
Cet état d’esprit incite peu à consommer ; les premiers postes touchés dans le budget familial sont donc les dépenses jugées moins prioritaires : loisirs, tourisme etc.
Les banques prêtent moins, donc les ménages consomment moins et achètent moins de logements ; les prix immobiliers chutent, les portefeuilles d’actions chutent (- 45 % en France) si bien que les ménages se sentent aussi moins riches = revenus en baisse, les ménages ne sont pas incités à consommer ; et encore ce sont les Américains les plus touchés par ces « effets de richesse » car eux n’ont pas épargné contrairement aux Français ; et le montant de leur retraite par capitalisation a baissé de 20 % depuis 15 mois.
Les entreprises anticipant une baisse de la demande annulent leurs projets d’investissements : VEOLIA vient d’annoncer un plan de réduction de ses investissements en même temps qu’une hausse de 10 % du dividende versé à ses actionnaires !
Avec le développement durable, il faut espérer que la crise permettra de relancer l’activité dans l’écologie et les économies d’énergie, que ce soit dans le bâtiment ou dans l’automobile.
► CRISE DE L’IMMOBILIER
Autre secteur touché fortement par la crise : l’IMMOBILIER. La baisse des prix a commencé et certains promoteurs sont en redressement judiciaire, les acheteurs potentiels préfèrent attendre que la baisse s’accentue, ce qui est prévu en 2009. Avec la flambée des prix, le nombre d’agences immobilières avait augmenté de + 10 000 agences en 10 ans ; beaucoup d’entre elles sont en difficulté.
Le secteur du BTP est donc frappé par la crise et il est prévu une chute du nombre de logements construits avec des suppressions d’emplois ; l’Etat français va apporter son aide à ce secteur économique.
Conclusion :
On voit donc bien le risque de « cercle vicieux dépressif » dans l’économie mondiale ; un spécialiste des prévisions, qui craint le risque de déflation, juge que « ce qui va se passer dans les 6 prochains mois sur le prix des actifs –immobilier et entreprises- est décisif » (X. Timbeau OFCE, Le Monde 17/12/08).
L’intervention des Etats est donc indispensable pour soutenir la demande globale par leurs propres dépenses, garantir les crédits et recapitaliser les banques.
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1 commentaire:
Excellent exposé :)
je n'avais pas pris conscience du problème que pouvait poser le rationnement du crédit, jusqu'a ce que je lise un <a href="http://www.finance-etudiant.fr/exposes/Rationnement-de-Credit-120.html>exposé</a> à ce sujet...
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