25 févr. 2011

Faut-il craindre le retour de l'inflation ?



Faut-il craindre le retour de l’inflation ?

La flambée du prix du pétrole, des matières premières, dans une conjoncture secouée par la crise, fait valser les étiquettes des produits de consommation courante. Dans ce contexte, l’inflation va resurgir.
Cette poussée de fièvre inflationniste reste encore contenue, mais elle pourrait bien vite s’étendre à l’ensemble des produits. Alors faut-il craindre un retour de l’inflation ? Si oui, quels pourraient en être les risques ?

Il n’y a pas lieu de s’inquiéter tant que la hausse généralisée et durable des prix n’enclenche pas les trois rouages suivants.
La hausse actuelle des prix est plutôt liée au rouage de la demande à l’égard de certains produits. La poussée des prix des matières premières et des produits pétroliers, s'explique par un niveau de demande bien supérieur à l'offre. Entretenu par une spéculation nocive, il provoque, selon les mécanismes du marché un ajustement des prix à la hausse. Ce rouage ne porte, pour le moment que sur le quart de l’ensemble du panier de produits pris en compte par l’INSEE pour calculer l’indice des prix.
Cette fièvre inflationniste reste faible, car les deux autres rouages de l’inflation ne sont pas activés. Celui de la quantité de monnaie en circulation semble être bien contrôlé par la Banque Centrale Européenne grâce à ses taux d’intérêt.
Quant au troisième, celui de la progression des salaires, verrouillé par le pacte de compétitivité entre l’Allemagne et la France, est au point mort. Il est donc peu probable qu’il amplifie, par son mécanisme, la fameuse spirale hausse des salaires - hausse des prix qui provoque l’inflation par les coûts.
Alors pourquoi s’inquiéter d’un retour de l’inflation ?
Il y a pourtant, quelques craintes à avoir. La première raison est que cette petite fièvre se déclenche à un mauvais moment. L’état de santé de notre économie est encore très fébrile : une croissance du PIB qui a du mal à atteindre les 2%, un déficit du commerce extérieur qui s’aggrave de plus en plus, un taux de chômage qui peine à descendre en dessous de la barre des 9%, un pouvoir d’achat toujours en berne et une dette publique qui dépasse les 78% du PIB.
Elle arrive en outre au moment où la crise financière oblige désormais l’Etat à appliquer une politique de rigueur. Ce qui va freiner les investissements et la consommation donc ralentir l’activité économique globale et aggraver considérablement le chômage.

De plus, elle vient aggraver la dégradation du pouvoir d’achat des ménages. En effet, le pouvoir d’achat étant déjà très peu progressif, la moindre hausse des prix, aussi mesurée soit-elle, amplifie encore plus la douleur. Les victimes sont les ménages aux revenus moyens, les fonctionnaires, les retraités dont les pensions sont revalorisées avec du retard, et les salariés d’entreprises exposées à la concurrence étrangère. Les ménages seront donc obligés de réduire leurs dépenses alimentaires pour pouvoir finir leur fin de mois, d’autres puiseront dans leur épargne pour maintenir leur niveau de vie. Dans ce contexte, cette petite fièvre accentue gravement les inégalités sociales, et développe un sentiment réel d’injustice par rapport aux profits records de certains traders et entrepreneurs du CAC40 réalisés en 2010.
Mais le risque majeur, c’est que cette situation pourrait brider le moteur de la consommation qui jusqu’à présent, est le seul à tirer la croissance encore très poussive.
La crainte de l’inflation renforce la vigilance monétaire de la Banque Centrale Européenne afin d’éviter tout dérapage des prix et des anticipations inflationnistes. Sous la pression de l’Allemagne, elle continue de maintenir des taux d’intérêt élevés et un euro fort malgré la rigueur économique.
Ce regain d’inflation empêche toute distribution supplémentaire de pouvoir d’achat de peur de généraliser la hausse des prix et d’activer le troisième rouage de l’inflation. La lutte contre l’inflation pourrait redevenir ainsi la priorité économique au détriment de la croissance et de l’emploi.
Mais devra-t-on accepter encore moins de croissance et plus de chômage, pour faire baisser cette fièvre inflationniste qui grimpe ?