La flambée du prix du pétrole, des céréales et du lait dans une conjoncture secouée par la crise financière des crédits hypothécaires, fait valser les étiquettes des produits de consommation courante. Dans ce contexte, l’inflation pourrait bien resurgir en 2008. En effet, le taux d’inflation, en ce début d’année, se situe autour de 3,3%, niveau jamais atteint depuis 1992 même si l'on est bien loin des taux de 10% dans les années 80 .
Cette poussée de fièvre inflationniste reste encore contenue, mais elle pourrait bien vite s’étendre à l’ensemble des produits. Alors faut-il craindre un retour de l’inflation ? Si oui, quels pourraient en être les risques ?
Il n’y a pas lieu de s’inquiéter tant que la hausse généralisée et durable des prix n’enclenche pas les trois rouages suivants.
La hausse actuelle des prix est plutôt liée au
rouage de la demande à l’égard de certains produits. La poussée des prix des matières premières et des produits agricoles, s'explique par un niveau de demande bien supérieur à l'offre, et provoque selon les mécanismes du marché un ajustement des prix à la hausse. Ce rouage ne porte, pour le moment que sur le quart de l’ensemble du panier de produits pris en compte par l’INSEE pour calculer l’indice des prix.
Cette fièvre inflationniste reste faible, car les deux autres rouages de l’inflation ne sont pas activés. Celui de la
quantité de monnaie en circulation semble être bien contrôlé par la Banque Centrale Européenne grâce à ses taux d’intérêt élevés.
Quant au troisième, celui de
la progression des salaires, il est au point mort. Il est donc peu probable qu’il amplifie, par son mécanisme, la fameuse spirale
hausse des salaires-hausse des prix qui provoque l’inflation par les coûts.
Alors pourquoi s’inquiéter d’un retour de l’inflation ?
Il y a pourtant, quelques craintes à avoir. La première raison est que cette
petite fièvre s’est déclenchée à un mauvais moment. L’état de santé de notre économie est encore fébrile :
une croissance du PIB qui a du mal à dépasser les 2%, un déficit du commerce extérieur qui s’aggrave de plus en plus, un taux de chômage qui peine à descendre en dessous de la barre des 8%, un pouvoir d’achat toujours en berne et une dette publique qui dépasse les 64% du PIB.
Elle arrive en outre au moment où la crise financière immobilière oblige désormais les banques à limiter leurs crédits. Ce qui va freiner les investissements des ménages et donc ralentir l’activité économique globale.
De plus,
elle vient aggraver la dégradation du pouvoir d’achat des ménages. En effet, le pouvoir d’achat étant déjà très peu progressif, la moindre hausse des prix, aussi mesurée soit-elle, amplifie encore plus la douleur. Les victimes sont les ménages aux revenus moyens, les fonctionnaires, les retraités dont les pensions sont revalorisées avec du retard, et les salariés d’entreprises exposées à la concurrence étrangère ou à une forte élasticité de la demande par rapport aux prix. Certains ménages sont donc obligés de réduire leurs dépenses alimentaires pour pouvoir finir leur fin de mois, d’autres puisent dans leur épargne pour maintenir leur niveau de vie. C’est une petite fièvre, certes, qui malheureusement dans ce contexte, accentue davantage les inégalités sociales et développe un sentiment réel d’injustice par rapport aux profits records de certains entrepreneurs
du CAC40.Mais le risque majeur, c’est que cette situation pourrait brider le moteur de la consommation qui jusqu’à présent, est le seul à tirer la croissance.
La crainte de l’inflation renforce la vigilance monétaire de la Banque Centrale Européenne afin d’éviter tout dérapage des prix et des anticipations inflationnistes. Elle continue de maintenir des taux d’intérêt élevés malgré un euro fort (
lien sur l'euro fort) et une récession économique annoncée.
Ce regain d’inflation empêche toute distribution supplémentaire de pouvoir d’achat de peur de généraliser la hausse des prix et d’activer le troisième rouage de l’inflation. La lutte contre l’inflation redeviendrait ainsi la priorité économique au détriment de la croissance et de l’emploi.
Mais doit-on accepter moins de croissance et d'emploi pour faire baisser la fièvre inflationniste, ou au contraire, avoir un peu d'inflation pour moins de chômage et plus de croissance?
Faudrait-il craindre davantage l’inflation que le chômage... ?