Dans le contexte international actuel, notre modèle social devient de plus en plus
coûteux. Il pèse sur la compétitivité-prix des entreprises qui ont du mal à
gagner des parts de marché : leur coût du travail est supérieur à celui de
leurs concurrents étrangers. Nos entreprises sont alors tentées de considérer les
salaires uniquement comme un coût, et non plus comme la condition des débouchés
de leur production. La protection sociale est, elle aussi, victime de ce même
préjugé et la voilà présumée, à tort, attentatoire à la compétitivité, sans qu’il
ne soit envisagé un seul instant qu’elle puisse être une richesse nationale.
Face à la vivacité de la concurrence des pays émergents, et en
particulier face à celle de la Chine qui affiche des coûts du travail très
faibles et qui n’admet aucun mécanisme de protection sociale fut-il sommaire,
nos industries des secteurs textile et de l’équipement ménager ont, dans leur
écrasante majorité, fermé. D’autres, se sont délocalisées, provoquant la
désindustrialisation de certaines régions où la disparition des filières
industrielles a considérablement aggravé le chômage et le déficit du
commerce extérieur.
Le coût du travail serait, à lui seul, responsable du déclin
industriel et de la hausse du chômage. Cette idée reçue conduit notre économie
en quête de compétitivité dans une spirale conflictuelle qui oppose les producteurs
et les salariés. Le chantage à la délocalisation comme mode de révision à la
baisse des salaires ou des cotisations sociales, pourrait devenir l’alternative
au chômage comme s’y sont résignés en période de
croissance, ces salariés allemands que certains économistes ne cessent de
donner en exemple.
Faudrait-il alors accepter, au
nom de la compétitivité, une modération des salaires ou une précarité sociale
pour maintenir l’emploi sur le territoire ? Cette recherche accrue de la
compétitivité- prix par les entreprises à travers la dévalorisation du travail,
tend à opposer les intérêts de ceux qui achètent aux intérêts de ceux qui
produisent, oubliant au passage que ceux qui produisent et qui achètent sont
les mêmes agents économiques dénommés autrement .
Ce
choc de compétitivité précarise le
travail, incite les ménages à consommer moins cher, obligeant ainsi les entreprises à leur tour, à
produire encore moins cher en comprimant davantage leurs coûts salariaux pour
rendre leurs produits plus compétitifs afin de satisfaire les besoins des consommateurs.
Elle
constitue un cercle vicieux qui dresse les salariés contre les consommateurs ou
autrement dit, les salariés contre eux-mêmes.
En omettant que les salariés sont aussi des consommateurs, ce cercle vicieux dans lequel les prix peu élevés conduisent à des salaires peu élevés qui entraînent une consommation timide et qui débouchent sur des délocalisations faute d’un niveau de consommation suffisant, est à l’œuvre.
A cause de ses effets contradictoires, cette course à la compétitivité n’est plus adaptée à la situation économique actuelle, asphyxiée par l’austérité. Dans ce contexte économique, un tel choc, coûtera plus cher que ce qu’il ne rapporte à notre économie. Toute baisse des cotisations sociales est compensée par une hausse des impôts pénalisant le pouvoir d’achat.
La compétitivité-prix ne pourra sortir de cet engrenage,que si la baisse des charges du travail cible seulement les entreprises exposées à la concurrence internationale. Autrement dit, elle doit être calculée selon la situation des entreprises.
Car la compétitivité n’a pas le même sens pour toutes les firmes. Certaines d’entre elles, en fonction de leur environnement et de leurs stratégies, valorisent davantage leurs prix en cherchant à réduire leur coût du travail, alors que d’autres choisissent la qualité en valorisant le travail. C’est pourquoi, vouloir l’instaurer globalement à l’ensemble des entreprises,
ne ferait qu’aggraver ce rouage conflictuel au niveau de l’économie globale
La
segmentation de la compétitivité, évitera ainsi une diminution générale des
ressources de la protection sociale, permettra de maintenir les activités des
entreprises face à la concurrence mondiale et donc compensera cette réduction des
ressources de la sécurité sociale, en sauvant des emplois et en garantissant le
niveau de la demande.
Seul ce pacte contractuel permettra
de retrouver une compétitivité préservant à la fois notre protection sociale et
la croissance, sans une nouvelle hausse des prélèvements obligatoires !