L’impôt : « du moins faute de mieux »
L’impôt n’est pas ce qu’il est, mais ce que l’Etat en fait. Mais, le réduire, qui s’en plaindrait ? La fiscalité est toujours jugée excessive et injuste par les individus. Justifiée en théorie par des raisons économiques, car le poids des prélèvements fiscaux freine le dynamisme du marché, la baisse de l’impôt de 2010 répond davantage à des motifs politiques dans la pratique.
En effet, les baisses successives des années précédentes n’ont pas permis d’accroître la consommation des ménages, ainsi que les investissements des entreprises pour stimuler la croissance économique. Bien au contraire, elles ont encouragé l’épargne des ménages les plus aisés, et donc n’ont pas eu l’effet de relance de l’activité économique par la demande.
La poursuite de cette diminution est révélatrice d’un choix de société. Elle conforte l’idée que l’intérêt individuel prime sur l’intérêt général et que seul le secteur privé crée des richesses. Par conséquent, les impôts qui financent l’action publique représentent une charge improductive qu’il faut faire disparaître ou qu’il faut réduire.
Cette vision libérale forge progressivement un sentiment antifiscal dans les comportements des acteurs économiques en renforçant leur individualisme. Elle cimente ainsi petit à petit l’idée que l’impôt est une nuisance qui décourage l’esprit d’entreprendre, freine la création de richesses et pénalise l’emploi.
Et pourtant, un tel désengagement fiscal fait plus de mal que de bien.
Il aggrave le déficit budgétaire et alourdit considérablement la dette publique. Son financement par l’emprunt public accroît l’injustice sociale. Car l’Etat emprunte des capitaux aux ménages les plus aisés à des taux supérieurs à ceux du marché financier, au lieu de percevoir les impôts sur leurs revenus. Les classes moyennes, contribuent alors, par l’impôt sur le revenu au remboursement du capital emprunté aux plus riches. Et,
faute d’imposition suffisante pour les revenus financiers colossaux, il encourage la cupidité responsable de la crise actuelle.
De plus, une telle diminution suppose la réduction des missions d’intérêt public de l’Etat car nos impôts financent le fonctionnement des services publics indispensables à la vie économique et sociale : santé, éducation, culture, justice, sécurité, transports, routes…
L’impôt est le prix à payer pour utiliser ces services collectifs et réduire les inégalités sociales.
Alors comment en payant moins d’impôt peut-on avoir plus de sécurité, plus de santé, plus d’égalité et plus d’éducation ?
Le problème qui se pose ainsi est celui du rôle de l’impôt dans notre société aujourd’hui, et à travers lui, celui des services publics et de notre modèle social.
Cette course à la baisse des impôts fragilise la place et le rôle des services publics dans notre société en ne valorisant que l’intérêt individuel. Et, progressivement, elle pourrait les faire disparaître faute de ressources suffisantes pour gérer au mieux l’intérêt public. Lui préférant sa baisse, l’Etat doit-il renoncer à toute réforme de l’impôt direct, et donc abandonner une partie de ses services publics à la concurrence pour réduire son déficit ?
Mais moins d’impôt, c’est moins d’Etat. Les citoyens sont-ils prêts en accepter la charge individuelle?
Le « moins d’impôts » reste une illusion. Et pourtant, malgré ses risques, l’idée de payer moins d’impôt nous réconforte toujours.
La dimension citoyenne de l’impôt sur le revenu se perd, car les ménages ordinaires ont le sentiment d’en payer toujours trop pour un retour en contrepartie insuffisant ou peu significatif, voire même invisible.
Aujourd’hui, la charge fiscale est devenue trop lourde, car elle est inégalement répartie entre les contribuables et trop souvent détournée par les niches fiscales ou paradis fiscaux. En outre, seuls 50% des ménages sont assujettis à l’impôt sur le revenu.
Or, si l’on veut corriger cette perception qu’ont aujourd’hui les contribuables, et si l’on souhaite maintenir notre modèle social, redonner du sens à l’intérêt général et réduire les inégalités, il faut réformer notre système fiscal, plutôt que de baisser les impôts, afin de le rendre plus efficace, plus juste et plus transparent. Autrement dit passer d’une politique budgétaire fondée sur le « moins d’impôts » à une politique budgétaire fondée sur le « mieux d’impôts ».
Ce passage nécessite un élargissement de l’assiette fiscale aux bonus et aux capitaux financiers ne produisant aucune richesse réelle. Cela implique de donner un poids substantiel à l’impôt progressif en réduisant les autres impôts, et de lui attribuer un rôle majeur de gestion et de redistribution afin de valoriser davantage la richesse produite par le travail que celle par le capital. Ce n’est qu’à cette condition, qu’il pourra orienter la finance vers l’économie réelle et rétablir un meilleur partage de la valeur ajoutée.
Le rendement d’échelle ainsi réalisé, devrait garantir la pérennité de notre modèle social à travers les services publics, et modifier nos comportements à l’égard de l’impôt devenu plus juste et plus efficace.
Alors pourquoi ne pas explorer cette voie et s’y engager ?
Il faudra donc beaucoup de courage politique et de solidarité pour supprimer les niches fiscales et les paradis fiscaux, et encore davantage pour réhabiliter cette idée simple que l’impôt progressif n’est pas seulement un coût, mais le prix équitable à payer pour bénéficier des services publics et préserver notre modèle social dans l’intérêt de tous les citoyens.
Or un tel courage permettrait que la richesse de chacun fasse aussi la richesse de tous.
L’impôt n’est pas ce qu’il est, mais ce que l’Etat en fait. Mais, le réduire, qui s’en plaindrait ? La fiscalité est toujours jugée excessive et injuste par les individus. Justifiée en théorie par des raisons économiques, car le poids des prélèvements fiscaux freine le dynamisme du marché, la baisse de l’impôt de 2010 répond davantage à des motifs politiques dans la pratique.
En effet, les baisses successives des années précédentes n’ont pas permis d’accroître la consommation des ménages, ainsi que les investissements des entreprises pour stimuler la croissance économique. Bien au contraire, elles ont encouragé l’épargne des ménages les plus aisés, et donc n’ont pas eu l’effet de relance de l’activité économique par la demande.
La poursuite de cette diminution est révélatrice d’un choix de société. Elle conforte l’idée que l’intérêt individuel prime sur l’intérêt général et que seul le secteur privé crée des richesses. Par conséquent, les impôts qui financent l’action publique représentent une charge improductive qu’il faut faire disparaître ou qu’il faut réduire.
Cette vision libérale forge progressivement un sentiment antifiscal dans les comportements des acteurs économiques en renforçant leur individualisme. Elle cimente ainsi petit à petit l’idée que l’impôt est une nuisance qui décourage l’esprit d’entreprendre, freine la création de richesses et pénalise l’emploi.
Et pourtant, un tel désengagement fiscal fait plus de mal que de bien.
Il aggrave le déficit budgétaire et alourdit considérablement la dette publique. Son financement par l’emprunt public accroît l’injustice sociale. Car l’Etat emprunte des capitaux aux ménages les plus aisés à des taux supérieurs à ceux du marché financier, au lieu de percevoir les impôts sur leurs revenus. Les classes moyennes, contribuent alors, par l’impôt sur le revenu au remboursement du capital emprunté aux plus riches. Et,
faute d’imposition suffisante pour les revenus financiers colossaux, il encourage la cupidité responsable de la crise actuelle.
De plus, une telle diminution suppose la réduction des missions d’intérêt public de l’Etat car nos impôts financent le fonctionnement des services publics indispensables à la vie économique et sociale : santé, éducation, culture, justice, sécurité, transports, routes…
L’impôt est le prix à payer pour utiliser ces services collectifs et réduire les inégalités sociales.
Alors comment en payant moins d’impôt peut-on avoir plus de sécurité, plus de santé, plus d’égalité et plus d’éducation ?
Le problème qui se pose ainsi est celui du rôle de l’impôt dans notre société aujourd’hui, et à travers lui, celui des services publics et de notre modèle social.
Cette course à la baisse des impôts fragilise la place et le rôle des services publics dans notre société en ne valorisant que l’intérêt individuel. Et, progressivement, elle pourrait les faire disparaître faute de ressources suffisantes pour gérer au mieux l’intérêt public. Lui préférant sa baisse, l’Etat doit-il renoncer à toute réforme de l’impôt direct, et donc abandonner une partie de ses services publics à la concurrence pour réduire son déficit ?
Mais moins d’impôt, c’est moins d’Etat. Les citoyens sont-ils prêts en accepter la charge individuelle?
Le « moins d’impôts » reste une illusion. Et pourtant, malgré ses risques, l’idée de payer moins d’impôt nous réconforte toujours.
La dimension citoyenne de l’impôt sur le revenu se perd, car les ménages ordinaires ont le sentiment d’en payer toujours trop pour un retour en contrepartie insuffisant ou peu significatif, voire même invisible.
Aujourd’hui, la charge fiscale est devenue trop lourde, car elle est inégalement répartie entre les contribuables et trop souvent détournée par les niches fiscales ou paradis fiscaux. En outre, seuls 50% des ménages sont assujettis à l’impôt sur le revenu.
Or, si l’on veut corriger cette perception qu’ont aujourd’hui les contribuables, et si l’on souhaite maintenir notre modèle social, redonner du sens à l’intérêt général et réduire les inégalités, il faut réformer notre système fiscal, plutôt que de baisser les impôts, afin de le rendre plus efficace, plus juste et plus transparent. Autrement dit passer d’une politique budgétaire fondée sur le « moins d’impôts » à une politique budgétaire fondée sur le « mieux d’impôts ».
Ce passage nécessite un élargissement de l’assiette fiscale aux bonus et aux capitaux financiers ne produisant aucune richesse réelle. Cela implique de donner un poids substantiel à l’impôt progressif en réduisant les autres impôts, et de lui attribuer un rôle majeur de gestion et de redistribution afin de valoriser davantage la richesse produite par le travail que celle par le capital. Ce n’est qu’à cette condition, qu’il pourra orienter la finance vers l’économie réelle et rétablir un meilleur partage de la valeur ajoutée.
Le rendement d’échelle ainsi réalisé, devrait garantir la pérennité de notre modèle social à travers les services publics, et modifier nos comportements à l’égard de l’impôt devenu plus juste et plus efficace.
Alors pourquoi ne pas explorer cette voie et s’y engager ?
Il faudra donc beaucoup de courage politique et de solidarité pour supprimer les niches fiscales et les paradis fiscaux, et encore davantage pour réhabiliter cette idée simple que l’impôt progressif n’est pas seulement un coût, mais le prix équitable à payer pour bénéficier des services publics et préserver notre modèle social dans l’intérêt de tous les citoyens.
Or un tel courage permettrait que la richesse de chacun fasse aussi la richesse de tous.